Et au milieu coule une rivière. Quiconque a un jour eu un intérêt pour la pêche à la mouche connait ce film de Robert Redford. Ici au Québec la traduction a pondu un mystérieux « la rivière du sixième jour ». Pour rappel, l’oeuvre originale de Norman Mclean a pour titre « A River Runs Through It« . Weird !
J’ai simplement de plus en plus de mal à me faire demander, dès que je fais mention de la pêche à la mouche, si j’ai vu ce film ! Criss bien sûr que je l’ai vu, je l’ai même en DVD, pitié, ça fait juste vingt ans qu’il est sorti, lâchez-moi avec ça, de grâce trouvez d’autres références (c’est valable pour tout le monde d’ailleurs) ! 🙂
Mais ce n’était pas de ce film dont je voulais parler.
Mon père n’était pas pasteur, et je ne vivais pas dans le Montana. Mieux que ça !
Mon père était ouvrier et avait appris d’un vieux monsieur, qui l’avait pris comme alibi et de fait sous son aile, pour justifier ses escapades halieutiques, comment déjouer les truites dans nos petits ruisseaux. Il faut dire que le vieil homme avait quelques problèmes cardiaques et son épouse ne consentait que très peu à le laisser prendre la poudre d’escampette sans un compagnon.
J’aimais aller chez mes grand-parents. Pour moi, le voyage était synonyme de jeu dans l’eau, de pierres glissantes, de grands prés fraichement fauchés et surtout de truites que mon oncle ne manquait pas de me rapporter de la rivière afin que je puisse les voir évoluer dans le grand bassin en pierre qui servait d’abreuvoir au bétail, pour mon plus grand plaisir.
J’aime la pêche depuis le temps où mon papa m’a mis une canne dans les mains pour aller pêcher dans MA rivière, chez mon grand-père..
Si je mets un MA majuscule c’est que depuis que je sais marcher, cette rivière (enfin ici on dirait le ruisseau, c’est en fait un petit torrent de montagne) était mon terrain de jeu. J’y ai fait des moulins à eau, j’y ai vu mes premières éphémères éclore, j’ai surpris nombre d’animaux venant s’y abreuver, j’étais capable de la traverser de pierre en pierre en quelque secondes sans me mouiller, j’y ai ramassé mes premiers porte-bois… Et j’y ai pêché mes premières truites brunes salmo trutta fario…
La fario a été pour moi l’espèce reine, celle pour qui toute l’attention était consacrée. Les souches indigènes de cette rivière sont très difficiles à déjouer, mon père m’a enseigné à son tour l’art difficile de l’approche discrète, la lecture du cours d’eau, la présentation la plus naturelle possible du leurre… Les premières prises du jeune adolescent que j’étais, je les présentais fièrement comme des trophées. Elles avaient pour moi valeur d’examen et justifiaient à mes yeux le temps que mon père avait pu me consacrer à cet art qu’il s’était fait lui-même enseigner.
Pourquoi racontai-je tout cela ? Pour rien, comme ça… Ah si, on m’a demandé pourquoi j’avais choisi le nom de Salmo Trutta Fario pour mon blog. J’aurais pu tout autant le nommer L’Escoutay, le doux nom de MA rivière d’enfance mais beaucoup n’auraient alors pas compris… 😉
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J’avais envie de vous faire profiter de ce texte, publié il y a 3 ans maintenant, quasiment jour pour jour et que beaucoup de visiteurs n’ont jamais lu, n’ayant pas la patience de remonter si loin dans les articles. Bonne lecture.
Très joli petit texte qui reflète bien ce que chaque pêcheur garde profondément ancré au plus profond de son être.